Le 9 juin 1960 à 22 H, trois dirigeants de la
Wilaya IV, Si Salah (Salah Zamoum), commandant de Wilaya, son adjoint
militaire Si Mohamed (Djillali Bounaama) et son adjoint politique
Lakhdhar Bouchemaa ont rencontré, au Palais de l'Elysée à Paris, le
Général De Gaulle, entouré de deux collaborateurs, Bernard Tricot et
le général Mathon.
Les
trois participants à la rencontre, côté algérien, sont morts. Si
Salah, destitué, a été envoyé en Tunisie pour être jugé par le
GPRA. Il tombe dans une embuscade en cours de route. Lakhdhar Bouchemaa,
arrêté et jugé, est exécuté. Si Mohamed, qui succède à Si Salah
à la tête de la Wilaya, tombe le 8 août 1961 dans un accrochage avec
une élite d'élite de l'armée française au coeur de la ville de
Blida.
Sont
également exécutés pour leur particpation à l'organisation de la
rencontre Abdellatif, un ancien du commando Ali Khodja, et Halim,
responsable des liaisons et renseignements.
Quelques
hommes jouent un rôle-clé dans le dénouement de l'affaire. Bounaama
d'abord, qui accepte de jouer le jeu, se rend à l'Elysée, et prend les
choses en main ensuite pour retourner la situation. Mohamed Bousmaha et
Lakhdhar Bouragaa, Belkacem Benhenni, Youcef Benkherouf, qui feront plus
tard partie du staff de la Wilaya.
La
rencontre de l'Elysée s'est déroulée dans un ciontexte particulier.
Aux plan politique et diplomatique, le FLN-ALN marquait des points
importants, et l'indépendance paraissait proche. Au plan militaire, la
Wilaya IV, sans frontière avec l'extérieur, ne recevait plus d'armes
de l'extérieur, et subissait une féroce pression de l'armée
française, engagée dans de grandes opérations.
S'il
est difficile d'établir avec précision le point de départ de cette
affaire, il semble qu'elle prend une tournure précise lorsqu'un juge de
Médéa est chargé par Lakhdhar Bouchemaa de prendre contact avec le
procureur général d'Alger pour des discussions discrètes peu après
un appel du généra De Gaulle à un cessez-le-feu. Les principaux
artisans de la rencontre semblent être Lakhdhar Bouchemaa, Abdellatif
et Halim. Si Salah prend le train en marche, et Bounaama, mis devant le
fait accompli, fait semblant de jouer le jeu.
La
rencontre permet aux dirigeants de la Wilaya IV d'entendre de vive ce
que les plus hauts responsables français ont à proposer. Isolés, sans
véritable lien avec l'extérieur, ils sont dans l'ignorance de ce qui
se fait à l'extérieur, d'autant plus que les relations avec
l'extérieur sont difficiles, sinon franchement mauvaises. Si Salah est
revenu totalement désenchanté d'un séjour au maroc et en Tunisie, et
Abdellatidf a été tout simplement arrêté et humilié au Maroc par
les dirigeants de l'extérieur.
la
rencontre a provoqué une grave crise au sein de la Wilaya IV, qui a
cependant pu redresser la situation d'abord en mettant fin aux contacts
par l'élimination des principaux protagonistes, ensuite par le
lancement d'opérations militaires et d'action politique d'envergure qui
allaient déboucher sur les manifestations de décembre 1960.
La
rencontre de l'Elysée en elle-même ne déboucha sur rien de concret.
De Gaulle y affirma son intention d'aller à un référendum, et les
dirigeants de la Wilaya IV affirmèrent leur volonté d'aboutir à
l'arrêt de l'effusion de sang si les conditions sont réunies.
Les
deux parties séparèrent sans accord précis, sans rendez-vous fixé,
et les dirigeants de la Wilaya IV se contentèrent de dire à de Gaulle
que si son intention d'aller au référendum était fondée, il n'y
aurait même plus besoin de prendre contact avec eux mais directement
avec le GPRA. |