La Wilaya IV            الولاية الرابعة التاريخية

 

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Documents

 

- Objectifs révolutionnaires,

in El-Moudjahid, août 1957

- Hassan IV, in Jeune Afrique, 1962

- Massu, Le Torrent et la digue (extraits)

- La vie en Wilaya IV

- Bougara: une plume subtile

 

 

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wilaya4@chez.com

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(…) J’ai connu Si Salah au douar Beni Massira en octobre 1956 (... ) Il revenait du congrès de la Soummam en compagnie de Si M’Hamed Bougara. La rencontre fut une occasion pour expliquer les décisions et orientations du congrès de la Soummam. J’appris ce jour là que Si Salah était devenu membre du commandement de la Wilaya IV.

C’était un homme grand et mince. Il parlait peu et juste, maîtrisant l’arabe et le français, doté d’une grande culture. Il n’avait alors pas dépassé la trentaine. Il était respecté de tous.

Si Salah s’est rendu à l’extérieur fin 1957 pour une mission dont l’objectif était :

a-     ramener des armes de l’extérieur

b-     améliorer la circulation des groupes qui se déplaçaient de la Wilaya IV vers l’est et l’ouest, souvent soumis à des pressions qui allaient parfois jusqu’à la liquidation physique.

Si Salah traversa les monts, les oueds et les ravins pour rencontrer ses frères à a frontière marocaine, puis se rendit au siège officiel de la direction à Tunis, mais il découvrit rapidement leurs luttes et leurs divergences marginales. Sa mission fut un échec.

Il décida de rentrer, mais on le lui interdit. On lui proposa des missions à l’extérieur, s’il suit leurs ordres. Ce fut pour lui un véritable choc psychologique. Il fut profondément touché de voir les dirigeants de l’extérieur, malgré le confort et le bien-être, comploter chacun de son côté, monter des pièges et s’entretuer pour des intérêts personnes sans aucun rapport avec la révolution.

Affronter l’ennemi à l’intérieur lui apparut mille fois préférable à ce faux confort dans lequel se prélassaient les autres au nom de la révolution et des révolutionnaires. Il décida de revenir les mains vides, ne ramenant qu’un livre ayant pour titre : « opération truquée ». Ce livre ne le quittait plus, comme si c’était la principale leçon de sa mission qui dura cinq longs mois à l’extérieur.

Il reprit ses activités aux côtés de Si M’Hamed Bougara, dont il était l’assistant, jusqu’à la réunion des colonels de l’intérieur en wilaya II. Si M’Hamed l’informa des résultats et le chargea de l’exécution.

Nous apprîmes dans un premier temps l’envoi d’unités symboliques en Wilayas I et VI pour mettre fin aux conflits qui s’y déroulaient Mais ceci ne dura pas longtemps, et la révolution perdit certains de ses piliers représentés pas Amirouche et Si Haouès. Après deux mois seulement, Si M’Hamed tombait en martyr à son tour le  mai 1959 au sud de Médéa. C’est ainsi que Si Salah devint automatiquement commandant officiel de la Wilaya IV.

Durant son commandement, notre Wilaya connut une série de problèmes importants. Le Conseil de Wilaya disloqué du fait de la sortie à l’extérieur de certains de ses cadres, notamment Omar Ousseddik et le Commandant Azzeddine. Le siège se durcit, des opérations ennemies d’envergure s’intensifièrent. Si Salah tenta de colmater les brèches, en organisant la première réunion qu’il dirigeait comme chef de Wilaya le 14 janvier 1960 à Rouabah, au nord de Boghar. Après une évaluation de cette étape difficile et les résultats de l’opération « Courroie », il choisit les membres de son conseil de Wilaya qui sont :

-         Salah Zamoun, chef de Wilaya

-         Mohamed Bounaama, son adjoint

-         Abdelhalim, responsable politique. Il fut choisi à ce poste en raison de sa grande culture, et parce qu’il était diplômé de l’école militaire du Caire.

-         Si Lakhdhar, responsable des liaisons et renseignements.

Ces deux derniers auront un rôle central dans la rencontre qui allait regrouper plus tard Si Salah et De Gaulle à L’Elysée.

Au cours de cette réunion, il fut également décidé de joindre la zone 5 à la Wilaya IV, alors qu’elle dépendait auparavant de la Wilaya VI. Ceci fut décidé après les incidents déplorables qui eurent lieu en Wilaya VI, et dont les résultats furent notamment la mort de tayeb Djoughlali, premier adjoint de Si Haouès, et d’autres officiers dont :

-         Si Khaled, secrétaire de la Wilaya VI,

-         l’officier Hamid, désigné à la tête des bataillons envoyés vers les Wilayas qui connaissaient des troubles (I et VI),

-         Si Djillali, chef des commandos, chargé de combattre les messalistes dans les monts de Boukehoul.

La réunion décida également de dépêcher des émissaires aux Wilayas I, III et VI pour voir s’il était possible de mettre à exécution les décisions prises par les colonels lors de leur réunion antérieure.

(…) Tout au début de son commandement de la Wilaya IV, Si Salah prit contact avec la direction établie alors aux frontières marocaines pour l’informer des derniers évènements après la mort de Bougara et les décisions qui furent prises.Le contact fut d’abord établi avec le Colonel Houari Boumediène à travers le chiffre. Il demanda un délai pour étudier la situation et promit une réponse au cours d’un prochain contact.

La nuit suivante, à la même heure, le contact fut de nouveau établi. La réponse était peu claire, et fut incroyable. Nos services s’attelèrent à déchiffrer le message, et après plusieurs tentatives, nous pûmes en confirmer le contenu (…) Nous crûmes cependant que l’ennemi, avec ses moyens performants, avait découvert nos émissions, et était parvenu à nous envoyer ce message insolent et vulgaire, pour provoquer le trouble et le doute dans nos rangs. Il avait l’habitude de le faire.

Avec calme et sagesse, Si Salah demanda de nouveau le contact avec Houari Boumediène par radio, par morse, pour confirmer définitivement le message de la veille. L’ennemi découvrit rapidement la communication, et couvrit les voix par une chanson de Mohamed Abdelouahab, « bafakkar fi elli nsani et ansa elli fakerni »… (Je pense à celui qui m’a oublié et oublie celui qui pense à moi) L’ennemi s’était habitué à passer cette chanson qui correspondait si bien à la conjoncture.

Si Salah réagit avec calme, pensant que le coup était monté par les services spéciaux français, et que le mot insolent de la veille provenait des services ennemis. Mais il dut rapidement déchanter car il se confirma que le même mot en chiffres de la veille était répété par Houari Boumediène. Si Salah était en compagnie de Bounaama.

Il ne répondit pas avec la même insolence, préférant la sagesse. Il écrit à cette direction de l’extérieur : « Conscient de ma responsabilité historique envers vos agissements à l’extérieur… Je vous propose de nommer un responsable de la Wilaya V, et qu’il soit à la tête de la zone 4. Si vous ne le fait pas, je serai contraint d’informer la base populaire de ce qui se passe entre nous, et de votre comportement indigne de la morale de la révolution ».

Aussitôt après, arriva la réponse, qui dénotait la peur de la direction à l’extérieur de voir sa situation étalée au grand public. Ils donnèrent leur accord pour désigner Si Tarek commandant par intérim de la Wilaya V. Ainsi, commença une coopération sincère entre les Wilayas IV et V. Si Salah dépêcha Si Hassan (Youcef Khatib) pour une mission durant laquelle il rencontra directement les responsales de zone de la Wilaya V. A son arrivée dans la région de Labiodh Sidi Cheïkh, la mission subit un accrochage avec l’ennemi durant lequel tombèrent les héros Mejdoub et Yahia Meghrebi.

Ceci est un témoignage sur l’existence d’une volonté sincère de coopération entre notre Wilaya et la Wilaya V. Si Salah continua sur la voie de son commandant et maître Si M’Hamed Bougara qui considérait l’Algérie comme un tout indivisible, et que le combat pour son indépendance nous amène au martyr sur toutes ses terres sans distinction.

Si Salah envoya également deux émissaires en Wilaya I et VI en complément de qu’avait entamé Si M’Hamed Bougara. Il envoya également Bounaama en Wilaya V. Pour des raisons opérationnelles, Si Hassan fit le voyage à sa place. Je me souviens être resté en contact permanent avec les émissaires en Wilayas I et VI, Si Halim et Si Lakhdhar, en ma qualité de responsable de l’organisation des groupes et chargé de leur accompagnement aux limites de notre Wilaya.

(…)Si Salah savait que cette rencontre (de l’Elysée) n’était pas un cadeau fait à l’ennemi, et qu’il ne négociait pas sur du vide, ni d’une position de battu. Il se baisait sur son histoire personnelle et militante, sur les victoires militaires remportées par l’ALN, sur les victoires politiques remportées par la diplomatie de la révolution auprès de l’opinion internationale et lors des sessions de l’ONU. Les Français connaissaient parfaitement son passé militant au sein de l’OS. C’était un compagnon de Krim Belkacem et Ouamrane, un des premiers à avoir rejoint la révolution. En plus, c’était un des proches du grand dirigeant Si M’Hamed Bougara, un homme investi de la confiance de tous et un homme politique d’expérience.

(…) Procès de Si Salah

Si Salah est revenu de la wilaya III. Il lui était possible de ne pas revenir. Sachant les mesures prises contre lui et les accusations qu’il encourait, il lui était même possible de trouver refuge auprès d’un général français et de vivre comme un roi. Il a préféré revenir au PC de la wilaya pour se défendre, argument contre argument, et confirmer à tous qu’il était le combattant ferme qui ne rompt pas (…) Il a préféré la confrontation avec tout ce qui en découle à la fuite. Il a préféré dire ce qu’il avait à dire, laissant à l’histoire seule le soin de juger. Il a accepté de devenir adjoint après avoir été chef de wilaya, sans que cela ne diminue en rien sa détermination.

Revenu au PC de la wilaya, il s’est mis à la disposition du commandement pour être jugé, sachant ce que signifie un jugement à cette époque. Lui-même avait eu souvent à juger des personnes, parmi lesquelles benmessaoud et Mohamed Kadhi, deux chefs de secteur, et la condamnation de Tayeb Djoughlali et son groupe.

Je dirais un mot pour l’histoire. Si Salah était juste dans ses jugements. Il ne faiblissait pas, et ne commettait pas d’injustice. Son cœur ne connaissait ni la rancune ni la haine. Il donnait à chacun son du.

Son arrivée coïncida avec celle de Ahmed Bencherif, qui arrivait de Tunis, après un terrible périple qui a duré une année entière. C’était le 16 septembre 1960. Au cours d’une rencontre en tête à tête avec Bounaama, Bencherif apprit toute l’affaire, selon version présentée par Bounaama. Quand Bencherif rencontra Si Salah, il serra la main de tout le monde, mais évita de lui tendre la main, disant avec hauteur : « Si Salah, j’aurais voulu t’embrasser deux fois sur le front, selon la volonté de ton frère Ferhat que j’ai laissé aux frontières, mais après avoir appris ce qui s’est passé, je m’excuse de ne pouvoir le faire ». Il y avait tant d’ironie et d’animosité dans ses propos que je ne pus me retenir : « s’il était absolument nécessaire d’accuser Si Salah et de le juger, ce ne sera sûrement pas toi qui le fera parce que tu ignores totalement la question ».

Témoignage de Lakhdhar Bouragaa

dans "Assassinat d'une révolution"

Si Salah