La
Wilaya IV a eu des rapports assez difficiles avec la direction du
FLN-ALN à l’extérieur, particulièrement après le départ de la
direction à partir de 1957. Cette détérioration a abouti aux
affrontements de 1962 entre certaines unités de la Wilaya IV et celles
de l’armée des frontières qui venaient conquérir Alger et le
pouvoir.
Initialement,
la Wilaya IV, dirigée par Rabah Bitat comprenait un tout relativement
homogène autour d’Alger, le centre-est et le centre-ouest. La présence
des dirigeants de la Révolution sur le territoire algérien permettait
de fréquents contacts. Du reste, durant les deux premières années, la
priorité était d’aller sur le terrain convaincre les militants, les
structurer et les organiser aussi bien sur le plan politique que
militaire.
Après
le congrès de la Soummam, auquel la Wilaya IV a contribué, les
principaux préparatifs s’étant déroulés sur son territoire, la
situation a commencé à changer. La Wilaya IV connaissait l’apogée
de sa puissance en 1957-1958, sous M’Hamed Bougara, avant l’établissement
des lignes Challe et Maurice et avant l’arrivée de De Gaulle au
pouvoir.
Ensuite,
les enjeux à l’extérieur commencèrent à évoluer, et la Wilaya IV
commençait à se sentir abandonnée. Les compagnies chargées
d’acheminer des armes se faisaient rares. Elles subissaient tant de
pertes tout le long du trajet que le Commandement de la Wilaya IV finit
par décider de ne plus envoyer de compagnies chercher des armes. Aucun
des quatre derniers dirigeants de la Wilaya IV, Si M’Hamed Bougara, Si
Salah, Si Mohamed et Si Hassan ne se rendit à l’extérieur à partir
de 1958. Si Salah mourut sur le chemin de Tunis, où il se rendait après
l’affaire de l’Elysée. Pour les dirigeants de la Wilaya IV, la
difficulté du voyage, les risques encourus pour de maigres résultats,
et la tendance deds chefs de wilaya à rester à l’extérieur
constituaient autant de raisons les incitant à rester au milieu de
leurs troupes.
Les
SOS lancés par les dirigeants de la Wilaya IV pour demander des armes
restèrent le plus souvent sans effet. Elle fut contrainte de survivre
avec ses propres moyens, en récupérant des armes lors d’opérations
et poussant les militaires algériens et supplétifs à la désertion en
ramenant avec eux le maximum d’équipements comme gage de leur
engagement.
L’Affaire
de l’Elysée, plus tard, fut largement due à ce manque de contact
avec la direction du FLN-ALN. Des dirigeants d’une Wilaya purent ainsi
prendre contact avec les dirigeants français, et organiser une
rencontre avec De Gaulle, sans que le GPRA ne soit au courant.
La
Wilaya IV se trouvait la moins représentée à l’extérieur. Au sein
des différents GPRA, elle était peu représentée. N’ayant pas de
représentant parmi ceux qui devinrent les hommes les plus puissants du
FLN-ALN, elle subit très durement la désorganisation et
l’affaiblissement des réseaux de ravitaillement à partir de l’extérieur.
N’ayant pas non plus de frontière avec l’extérieur, elle était
tributaire du passage à travers les autres Wilayas, sans connaissance
particulière des obstacles majeurs de l’époque, les lignes Challe et
Maurice.
Ce
n’est qu’avec l’avènement d’un système de transmissions
relativement efficace qu’elle put établir un contact suivi avec
l’extérieur. Mais ce moyen avait aussi ses travers. Selon la version
la plus courante, Si Mohamed, Chef de la Wilaya, a été repéré en août
1961 alors qu’il se trouvait à Blida à la suite d’émissions radio
en direction de l’extérieur.
Avec
les autres wilayas, par contre, le contact était excellent. Dès le début
de la Révolution, la zone une, à l’est d’Alger, établit le
contact avec la Wilaya III limitrophe. La zone trois, à l’ouest, établit
le contact avec la Wilaya V, dont les chefs de la zone quatre séjournaient
très souvent dans l’Ouarsenis, où ils lièrent d’amitié avec
Bougara, Bounaama et Si Hassan. Celui-ci fut blessé à la frontière
des deux wilayas, au cours d’une opération destinée à alléger la
pression sur les unités de la Wilaya V, en butte à une grande opération
de l’armée française. Quant à la Wilaya VI, dominée par un relief
plat offrant peu de possibilités pour les maquis, elle a souvent
établi son PC sur le territoire de la Wilaya IV.
La
contribution de la Wilaya IV à la préparation du congrès de la
Soummam fut déterminante. Plus tard, ses dirigeants ressentirent
l’absence de coordination à l’intérieur et participèrent à la réunion
de multiples rencontres. En décembre 1958, Bougara participe, en Wilaya
II, à une rencontre avec les chefs des Wilayas I, III, VI et un délégué
de la Wilaya II.
La
Wilaya IV fut chargée d’apporter une assistance à la Wilaya I, alors
en butte à des difficuléts internes, et la VI, qui se relevait
difficillement des affaires Bellounis et Cherif Bensaïdani. Les
commandos des zones une et deux de la IV furent envoyés en Wilaya I, où
ils restèrent huit et dix mois. Celui de la zone trois fut dépêché
en Wilaya VI.
Au
cours de cette réunion, Amirouche, chef de la Wilaya III, annonça à
Bougara qu’un complot s’était développé en Wilaya III et s’étendait
sur le territoire de la IV. Il s’agissait, selon Amirouche, d’une
infiltration massive d’Algériens qui seraient en faut des agents des
services spéciaux français. Cette affaire avait été montée par les
services français qui voulaient provoquer une implosion de l’ALN.
Elle a provoqué une atmosphère de méfiance, et elle a eu des conséquences
dramatiques, moins graves cependant en Wilaya IV qu’en Wilaya III. |